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Message pour les prêtres à l’aube de la Semaine sainte

Par de très nombreux échos, je sais combien vous avez accompagné le Peuple de Dieu en situation de confinement, dans la solitude pesante, dans la promiscuité lourde, dans la maladie douloureuse, dans le deuil éprouvant.

Béni soit Dieu pour votre prière, votre générosité, votre inventivité, votre prise de risque aussi car le virus et l’isolement ne s’arrêtent pas aux frontières du sacerdoce !

Et nous voici au départ de cette Semaine sainte, toujours confinés. Sans possibilité de rassemblements ni même de modestes assemblées.

Non pas seulement Pâque au tombeau mais toute la Semaine sainte : quel étrange appel du Seigneur pour tous les chrétiens et pour nous, prêtres.

Dieu nous demande de vivre autrement cette Semaine si particulière et dont nous savons qu’elle tient une place immense pour chacun de nous. Le Jeudi saint n’est-il pas notre fête ?

Dans nos différents lieux, nous l’avions préparée avec beaucoup de soin, en impliquant beaucoup de monde. Nous nous réjouissions d’avance de ces assemblées profondes et populaires où des visages rarement vus le reste de l’année se retrouvaient à brandir les rameaux ou à suivre le chemin de Croix.

Ce sont peut-être ces « pascalisants » qui seront les premiers perdants de ce confinement. Moins que les pratiquants, ils penseront à suivre autrement le rythme des Mystères. Il nous faudra y penser très fort quand l’orage sera passé. Comment les retrouver, eux qui viennent peu en nos églises ?

Nous pensons aussi aux catéchumènes dont le baptême sera repoussé. A ceux qui souhaitaient se confesser et qui ne le pourront pas. La liste de ceux qui nous sont confiés est longue et derrière la liste, des visages et des noms. L’amour que le Christ leur porte et qu’il leur témoigne à travers nous, ils le sentiront malgré la distance physique.

Car nous ne les abandonnons pas. Pas un seul d’entre eux, même s’ils sont trop nombreux pour que nous leur fassions un signe personnel.

A regarder de près, le Christ a vécu dans un certain huis-clos les grands jours qui rachètent le monde. Si les foules étaient là au bord du chemin et au pied de la Croix pour ricaner, plus personne n’était présent dans la clôture du tombeau, pas même la Vierge sinon par sa vive Espérance. Et au dernier repas, seuls les Apôtres apparaissent.

Oui, nous ne serons pas moins prêtres dans le confinement et en l’absence de peuple rassemblé autour du Christ. Nous serons prêtres plus profondément. Je viens d’achever un ouvrage du père Louis Lochet, prêtre du diocèse de Reims.

Dans un écrit de 1954, il décrit les difficultés du prêtre : « Je mène la célébration mais j’oublie d’y rentrer. Je ne prie plus avec les fidèles que je fais prier. Je n’entends plus cet Évangile que je proclame ou explique. Je le lis en fonction du sermon à faire à d’autres et des autres à convertir. »

Et il ajoute, certainement pour lui-même : « En apostolat, nous avons transformé en entreprise ce qui est mystère. » (Louis Lochet, Vers une Église renouvelée, Salvator, 2020, p. 48)

Qui d’entre nous n’a pas connu cet état de fait au moins sous forme de tentation ?

Avec cette étrange Semaine sainte, Dieu nous donne le temps et le chemin pour entrer personnellement au fond des mystères que nous célébrerons pour le peuple mais sans lui.

Avançons au large, au loin et en eaux profondes.

Je termine en vous partageant une certitude : nous connaîtrons la grande douceur de Dieu, au moment précis où nous en aurons besoin, comme une aile qui nous frôle. C’est là le prodige de l’Amour éternel qui n’oublie aucun d’entre nous.

Que Dieu vous garde tous : les chrétiens ont besoin de vous ! Et le monde aussi…

+ Luc Ravel

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